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Témoignage de Romaric Janssen, Ancien élève de l’ESSCA

Au terme de 5 années passées à l’ESSCA, j’ai profité de mon master en Corporate Finance pour tenter de mettre la finance au service du développement économique durable. C’est dans cette optique que j’ai décidé de partir effectuer mon stage de fin d’école dans une institution de microfinance (IMF) au Cambodge.

Témoignage-élève-ESSCAParti au mois de mars dernier, j’ai été soutenu dans mon projet par l’ESSCA tout au long de mon séjour et je suis heureux de pouvoir partager cette belle expérience en proposant un retour de ce que j’ai vécu.

Tout a commencé par une offre de stage de l’entreprise Veecus, qui offre un service de microfinance « en ligne », proposant un poste dans son IMF partenaire au Cambodge : CBIRD. Ma convention est donc établie avec ladite IMF et j’ai pour mission de mener une étude sur l’impact économique et sociale des micro crédits accordés par l’institution. Je travaille donc seul, au milieu de khmers ayant une toute autre approche du travail que moi et, il me faut rapidement m’adapter aux rudes conditions de travail local que je résumerais par l’expression : « Doucement le matin et pas trop vite l’après-midi. » Exit mon élan occidental de vouloir que les choses avancent. Ici il faut aller doucement et en détente, cela me va très bien d’autant plus qu’avec 35°C à l’ombre et une humidité de 80%, mieux vaut ne pas se stresser.

« Il est 22h30, bienvenue au Cambodge, nous sommes le 1er mars et j’ai troqué la température parisienne contre la cambodgienne passant ainsi de 3°C secs à 29°C humides. Me voilà parti pour 5 mois dans ce pays qui est ma première expérience asiatique. Après une nuit sans fermer l’oeil (remerciement ici au décalage horaire et à la chaleur), je trouve un moyen pour rejoindre la ville de Battambang où je suis officiellement en stage depuis 12 heures. Une fois arrivé dans les locaux, je découvre une équipe composée à 100% d’indigènes avec qui je vais être amené à travailler. Heureusement l’accueil est sympathique et il m’est accordé de pouvoir me trouver un hôtel pour aller me reposer. Je travaillerai demain !

Afin de conduire l’étude, il convient de rencontrer les emprunteurs et donc les micro entrepreneurs. Il ne s’agit pas de rester dans un bureau à regarder son ventilateur tourner, il faut aller « sur le terrain » et rencontrer ceux qui font le Cambodge. J’ai donc pour objectif de rencontrer une petite centaine de familles avec un questionnaire bien précis me permettant de comprendre l’évolution de leur situation depuis leur emprunt initial. En théorie la mission est donc relativement simple et je ne devrais pas avoir de mal pour rencontrer tout ce petit monde durant les 4 mois que je me donne avant de rédiger les conclusions. Mon plan d’action est donc prêt, je n’ai plus qu’à l’appliquer. C’est donc avec une motivation ô combien débordante que je me lance dans mon enquête pour me rendre bien rapidement à l’évidence : je suis candide ! Eh oui, pour aller sur le terrain encore faut-il avoir avec soi le chargé de client et un traducteur. Nous devons donc partir à trois et coordonner nos agendas. Encore une fois, cela paraît simple mais en réalité il est très difficile pour mes collègues de respecter leurs engagements. Aller sur le terrain devient donc un processus compliqué et lourd et, après mes 4 mois, je n’aurais finalement rencontré que 75 clients. Il faudra faire avec.

La seconde partie de mon travail a donc consisté à analyser les réponses obtenues lors de mes entretiens pour dresser un bilan de la situation sur le terrain et comprendre le profil général des bénéficiaires et comment ils ont progressé.

Au terme de cette analyse, j’ai donc eu à présenter mes résultats à l’équipe locale et j’ai été un peu gêné. En effet, je n’arrive pas vraiment à considérer ce que j’ai vu pendant 4 mois comme étant vraiment de la microfinance, cela ressemble plus à un service bancaire en milieu rural.

D’un autre côté, les clients en avaient vraiment besoin et nombre d’entre eux comptent dessus pour faire fonctionner leur activité. Je ne peux donc pas blâmer l’activité de CBIRD mais c’est vrai que je ne retrouve rien de la théorie relative à la microfinance sur le terrain. L’aspect social semble avoir totalement été mis de côté et cela me dérange. Je tente de leur expliquer qu’il ne faut pas seulement accorder des crédits mais aussi assurer une formation, des conseils et un véritable suivi tant sur le plan économique que social. Cela les interpelle, les dérange même pour certains mais ils ne sont pas nécessairement contre l’idée. Cependant c’est à ce moment là que j’ai compris la vrai différence entre l’investisseur français (Veecus) et le partenaire local (CBIRD), le premier fait de l’entreprenariat social et solidaire alors que le deuxième fait du « business ». Les attentes ne sont donc pas les mêmes et les réponses diffèrent logiquement. Si cela peut décevoir de prime abord, je dois dire que c’est aussi très enrichissant de comprendre les divergences de point de vue et cela fait partie intégrante du voyage : le dépaysement, la différence de langage, de culture, d’état d’esprit et… de stratégie !

Au terme de ces 5 mois, je suis donc ravi de mon expérience au Cambodge où j’ai beaucoup appris tant sur le plan professionnel que sur le plan humain. J’ai appris à vivre « à la locale », sans stress, à la rencontre des cambodgiens et de leur culture. Les voyages que j’ai pu faire dans le pays, les soirées que j’ai pu passer avec les autres expatriés, la gastronomie locale à base de…riz, la bière locale et le climat asiatique sont tant d’expériences qui laissent aujourd’hui de très bons souvenirs et qui donnent envie de repartir !